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Le ski de randonnée au printemps en Californie
Le 2 juillet 2023, par Larry Ménard
Beaucoup de Français que je rencontre ne savent même pas que l’on skie en Californie bien que les Jeux olympiques d’hiver de 1960 aient eu lieu à Lake Tahoe dans les Montagnes Sierra Nevada, et que le ski californien puisse être très bon. En hiver, la poudreuse peut être exceptionnellement profonde après de fortes tempêtes, comme cette année, la plus enneigée de ma vie, chaque forte tempête déposant un ou deux mètres de neige en quelques jours.
Si l’on exclut les expositions nord protégées du soleil qui conservent pendant plusieurs jours ou semaines une bonne neige poudreuse, étant donné que le Lac Tahoe est à la même latitude qu’Ibiza, les tendances au réchauffement tout à fait naturel entre les tempêtes, qui ont bien précédé les changements dramatiques du réchauffement de la planète induit par l’espèce humain, transforment souvent rapidement la poudreuse en une croûte lourde et cassante difficile à creuser (to carve) en ski. La poudreuse californienne n’est en rien comparable à la poudreuse incroyablement sèche et légère des Montagnes Rocheuses où il fait très froid l’hiver; une bonne journée de poudreuse dans le Colorado ou l’Utah est inoubliable.
En Californie, les mois de fortes précipitations sont généralement de décembre à mars, avec de grandes variations naturelles d’une année sur l’autre, et une tendance marquée à l’assèchement au printemps. Les variations climatiques naturelles, (affectées par les changements des courants de l’océan Pacifique, El Niño et La Niña, et par la trajectoire très variable du jet stream), accentuées par le réchauffement de la planète, viennent d’entraîner six années de sécheresse extrême, suivies par cette année de précipitations les plus énormes de ma vie.
Au cours de cette année de ski (2022-23), par exemple, 23 mètres de neige sont tombés sur le sommet de Mammoth Mountain (3371 m.), une station de ski située sur le côté centre-est de la Sierra Nevada, qui, par le passé, restait ouverte jusqu’au 4 juillet. C’est une année pour profiter pendant plusieurs mois au printemps et en été du manteau neigeux généreux.
Au printemps, quand les chutes de neige sont beaucoup moins importantes, le manteau neigeux se tasse et devient dense. La répétition quotidienne du dégel pendant la journée et du gel pendant la nuit transforme la texture de la neige en “neige de maïs”, de petites boules de neige, produisant des surfaces compactées, lisses, uniformes et relativement stables, sur lesquelles on glisse facilement lors d’une ascension matinale et qui s’assouplissent au fil de la matinée et de la journée. Quand les conditions sont idéales et que la descente est bien planifiée, même les descentes raides peuvent être relativement faciles car le friction sans glace ralentit, ce qui permet des virages fréquents et une bonne prise de carre pour les sauts de virage. “Corn snow” est souvent appelée “ego snow” parce qu’elle est facile à négocier; la descente est souvent amusante et détendue.
La Californie est montagneuse, même dans le sud près de Los Angeles, les Montagnes San Gabriel, (culminant avec le Mount San Antonio, 3069m), et les Montagnes San Bernardino, (culminant avec le Mount San Gorgonio, 3506m). Avant de déménager en France en 2005, plusieurs fois pendant les vacances de Pâques, mon épouse marseillaise Cathy et moi avons pris le téléphérique depuis les sables chauds du désert de Palm Springs, qui monte en pente raide jusqu’en haut du sommet isolé de Mt San Jacinto (3302m), où nous avons chaussé nos skis à talons libres pour l’ascension finale et relativement facile de 700 mètres jusqu’au sommet, avant de profiter de la superbe neige de maïs sur le chemin de la descente. Une fois, vers la fin du mois de mai, nous avons skié le Mont San Gorgonio avec de superbes conditions d’enneigement.
Au centre-est de l’Etat, les Montagnes Sierra Nevada, près la frontière avec le Nevada, sont 640 km de long, (dont le Mont Whitney, 4421m, le plus haut sommet du pays en excluant l’Alaska). Les Sierras sont granitiques, métamorphiques et volcaniques, et sont un paradis du ski au printemps, surtout le côté est qui s’élève abruptement au-dessus du haut désert: (du sud au nord), Owens Valley, Mammoth, Mono Lake et Tioga Pass (la route souvent fermée jusqu’au mi juin), Bridgeport et Sonora Pass (la route fermée jusqu’au début de juin), puis le Lac Tahoe, avec des sources chaudes sur des terrains publics tout le long. Parcs nationaux et “wilderness” protégé tout à fait sauvage sur presque toute la longueur de ce massif impressionnant, du sud jusqu’au Lac Tahoe.
Je présente maintenant des photos de ski au printemps en Californie, dont la plupart sont du mois de mai. Cathy et moi sommes allés 4 fois depuis 18 ans aux Etats-Unis, ces voyages prévus en partie pour faire du ski de randonnée après des hivers bien enneigés.
Owens Valley et Mammoth
Bridgeport et Sonora Pass
Pendant une dizaine d’années j’ai été un des chefs de sortie de ski de randonnée pour la section de la Baie de San Francisco du Sierra Club, l’organisation environnementale responsable pour la création du système des parcs nationaux, avec Cathy comme assistante. Rien à voir avec le Club Alpin Français que je trouvais souvent trop régimenté. Beaucoup d’accompagnateurs étaient super sympathiques, mais d’autres étaient très autoritaires. Après plusieurs années, nous avons abandonné.
Notre première sortie de ski était au début d’avril au lac Tahoe: camping à Grover Hot Springs State Park près de Markleeville et du ski à Hope Valley, Carson Pass (col), Echo Summit (col) et au South Lake Tahoe. Notre deuxième sortie, le dernier weekend de mai: camping à l’entrée sud de Lassen National Park, et du ski dans le Parc. A la fin de mai il y a 6 ans, il y avait toujours 6 mètres de neige au Lac Helen en bas de Lassen Peak, la route qui traverse le parc toujours fermée par la neige profonde. Dommage que j’ai cassé un de mes skis la première journée, mais toujours préférable à une fracture de cheville.
Hope Valley
Lake Tahoe
La chaîne volcanique des Cascades : Lassen et Shasta
Au nord des Sierras la plaque tectonique de Juan de Fuca a crée par subduction la chaîne volcanique des Cascades, qui commence au nord de la Californie avec le sommet du Mont Lassen (3,189), puis le Mont Shasta, (4,322m), le deuxième plus haut sommet de la chaîne. Il y a tant de neige dans Les Cascades, qu’on fait du ski en plein été. Une année le 6 juillet, j’ai fait l’ascension de Shasta, le versant sud, 2000 mètres de dénivelé par Avalanche Gulch et The Red Banks et la neige à mi-sommet a été excellente, (good corn snow). Une année d’enneigement exceptionnel, après des vacances en France, nous avons skié Lassen Peak le 22 août. Une année, au milieu du mois d’août, nous avons skié sur le Newton Clark Glacier, sur le versant est du Mont Hood, au-dessus du fleuve Columbia, dans l’Oregon, avec des conditions de neige printanières idéales.
Les Cascades sont une chaîne volcanique très active : Lassen (1914-17), Shasta (il y a 3200 ans), Les Trois Sœurs (il y a 2200 ans), Mt.Hood (1866), Mount st Helens (1980), Rainier (1450), Adams (il y a 6000 ans).
Certains Européens savent que les randonnées à ski de printemps en Californie peuvent être excellentes. Lors de l’un de nos séjours de ski, quelqu’un m’a raconté qu’il avait rencontré deux guides de ski suisses qui, après la fin de leur travail dans les Alpes, étaient venus skier à la fin du printemps dans les montagnes de la Sierra Nevada.
En 1971, un immigrant allemand, H.J. Burhenne, était tellement enthousiasmé par le ski de fin de saison en Californie qu’il a écrit un livre, aujourd’hui vintage, intitulé “Sierra Spring Ski Touring”.
Quand je vivais en Californie, j’avais l’habitude faire beaucoup de ski de randonné et un peu de ski de fond par an, la plupart du temps en avril et en mai, quand je pouvais skier sur des terrains escarpés sans craindre les avalanches, profiter de l’incomparable neige de maïs, me baigner dans des sources d’eau chaude, camper sans me geler, éviter des dépenses pour se loger, avoir des journées plus longues, apprécier la floraison printanière et chercher des morilles.
Tourisme dans la vallée d’ Owens
Les jours où l’on ne skie pas, en plus de la découverte de la nature, il y a étonnamment beaucoup de choses culturelles à apprécier dans la vallée d’Owens. Bien qu’on voie quelques pseudo-cowboys, il y a, en fait, plusieurs musées d’intérêt culturel et historique dans la vallée d’Owens.
The Manzanar National Historic Site, a été un des dix camps de relocalisation des personnes d’origine japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Le vaste musée du parc national, qui a ouvert ses portes en 1992, retrace l’histoire tragique, en partie raciste et xénophobe, et le camp d’internement a été restauré. Le mouvement en faveur de réparations et d’excuses publiques, principalement de la part des enfants des détenus, a été l’un des derniers mouvements en faveur de droits civiques dans les années 60 et 70. À force de persévérance, ils ont fini par l’emporter; le président Ronald Reagan a présenté des excuses publiques et des réparations ont été versées aux survivants et à leurs descendants.
The Eastern California Museum à Independence présente de nombreuses expositions intéressantes, notamment l’histoire des débuts de l’alpinisme sur la côte est des Sierra Nevadas, avec des portraits de Norman Clyde, Walter Starr, et David Brower de Berkeley (Sierra Club président, fondateur des Amis de la Terre).
L’histoire de la colonisation des terres et de l’eau par la ville de Los Angeles dans la vallée et la construction de l’Aqueduc Owens River-Los Angeles, qui a précipité des années de guerres de l’eau, est à ne pas manquer. Il en va de même pour les paniers tressés par les Shoshones et Paiutes.
Un jardin botanique de la flore indigène et des artefacts de pionniers et fermiers se trouvent à l’arrière du bâtiment.
Auparavant, le simple paysage devant le bâtiment était constitué d’une plantation massive d’un ciste originaire de Corse et de Crète, le Cistus creticus. Les plantes méditerranéennes indigènes sont couramment utilisées dans le monde anglo-saxon depuis des décennies, bien avant que de nombreuses espèces de plantes indigènes ne soient en vogue relativement récemment en France. Ainsi, de nombreux cultivars de cistes, d’euphorbes, de phlomises, etc. portent des noms anglais, ce qui témoigne de leur popularité. Dans le passé, j’avais l’habitude de voir de nombreuses espèces et hybrides de plantes indigènes de la Méditerranée beaucoup plus fréquemment dans les jardins de Berkeley qu’à Marseille.
The Owens Valley Paiute-Shoshone Cultural Center est dans la réserve indienne de Bishop. Le musée présente des expositions sur les modes de vie traditionnels des deux tribus voisins.
The Laws Railroad Museum and Historical Site est près de Bishop. La gare ferroviaire abandonnée, avec ses trains d’époque, et des nombreux bâtiments relocalisés de Bishop transportent le visiteur dans le Far West (tout comme la ville fantôme de Bodie, un parc d’Etat, au nord du lac Mono).
The Mountain Light Gallery à Bishop, présentent les photographies de nature de Galen Rowell, un photographe renommé de la nature, comme Ansel Adams et Elliot Porter, et alpiniste qui a vécu entre Bishop et Berkeley.
The Inyo National Forest- Eastern Sierra Visitor Center près de Lone Pine a des expositions sur l’histoire naturelle et des gardes forestiers qui peuvent conseiller les enthousiastes des activités de plein air. L’un des sponsors du centre étant le département de l’eau et de l’électricité de Los Angeles, la présentation des problèmes liés à l’eau n’est guère marquée par la critique typiquement sévère des colons capitalistes rapaces de Los Angeles, le point de vue traditionnel des premiers habitants de la vallée de l’Owens. Le film très fictif “Chinatown” a comme personnage central William Mulholland, l’ingénieur de l’aqueduc de Los Angeles.