Le 11 octobre 2023, par Larry Ménard
Après avoir complètement gâché la beauté du paysage urbain en le saturant de tags, les nouvelles surfaces disponibles devenant donc plus rares, les tagueurs ont de plus en plus envahi la campagne, voire le bord des sentiers. L’arrivée des tagueurs sur la Côte Bleue, autrefois plutôt exempte de graffitis, est assez récente et ils ont déjà recouvert tous les murs de pierre sur la route bordant la gare de Niolon. Comme dans le Parc national des Calanques où les tags viennent de commencer à apparaître sur les panneaux et même sur les rochers le long des sentiers, le même fléau s’étend au sentier du littoral près de Niolon et de Méjean.
Les “lowlifes” marseillais ont depuis un an commencé à taguer le paysage à la calanque des Anthénors et La Redonne en toute impunité. Est-ce que quelqu’un exige que la police détermine qui est responsable et les arrête ? Pas dans cette société locale où presque tout est permis.
Plus de 30 tags sont apparus au cours de l’été aux Anthénors, dont la moitié ont été réalisés par une seule personne. Sa signature est SHAK VG.
Les graffitis, pollution visuelle qui enlaidit les paysages urbains de Marseille, s’est considérablement aggravé depuis un an. Les tags sont ubiquistes et les tagueurs, à la recherche de nouvelles cibles, se déplacent hors de la ville vers de nouveaux lieux pour répandre leur fléau, les plus répréhensibles étant dans les espaces naturels. Ces violations des espaces publics et privés sont peu réprimées et sont devenues normalisées, incroyablement tolérées dans une certaine mesure par les autorités municipales qui les qualifient souvent de “street art” et le vandale d'”artiste graffeur”, allant même jusqu’à promouvoir les graffitis du quartier du Cours Julien comme une attraction touristique.
Tout aussi révoltants sont les tags historiques à la plage naturiste des Anthénors, dont la belle géologie a été entachée d’une quinzaine d’inscriptions proclamant d’une manière agressive que cette plage est naturiste. Se promener sous les falaises, c’est un peu comme longer un mur où la DEFENSE D’AFFICHER est postée à intervalles réguliers, ce qui m’a toujours semblé ironique. Une seule personne, m’a-t-on dit, les a repeintes l’année dernière avec des couleurs très intenses.
Comme j’en avais assez de les voir, les inscriptions n’ayant pas leur place dans la nature, j’ai procédé à leur enlèvement à la fin de l’été à l’aide d’outils de grattage et d’une brosse métallique. Alors que la plupart des naturistes approuvaient ce que je faisais mais étaient pessimistes quant à la durabilité de mon travail, plusieurs m’ont étonné en exprimant leur opposition ou indifférence absolue. J’ai donc enlevé les 9 marques de la partie centrale, ne laissant que deux ou trois à chaque extrémité de la plage naturiste non officielle, une concession.
Comme la ville n’était pas intervenue dans le vallon des Anthénors et qu’elle ne le ferait probablement pas, j’ai décidé d’entreprendre moi-même l’éradication des graffitis. L’élimination chimique était nécessaire. J’ai d’abord utilisé un solvant en bombe aérosol qui était trop cher, puis, après recherche et expérimentation, j’ai utilisé plusieurs bouteilles d’un substitut de l’acétone en plus de mes outils en métal quand approprié.
Après avoir consacré 37 heures de travail à l’enlèvement des graffitis et dépensé 41 euros en matériel, j’espère qu’il n’y aura rien de nouveau dans l’avenir proche.
Addendum (le 22 mars 2024)
À La Redonne, Les Anthénors et Figuières, les défigurations de surfaces artificielles et naturelles par des graffitis ont recommencé.
Le “naturiste” qui insiste pour “dénaturer” les belles formations géologiques et les gros rochers de la plage naturiste non officielle a rétabli les tags à la plupart des endroits où ils étaient auparavant. Fâché, j’ai réagi en effaçant toutes ces inscriptions ainsi que trois autres que j’avais laissées auparavant qui agressent les randonneurs et les “textiles” arrivant de Figuières.
Les ” graffiti artists ” marseillais sont de nouveau de retour, taguant une fois de plus la base en béton des poubelles aux Anthénors et la falaise rocheuse juste à l’est de la calanque. Sur les escaliers en béton entre Figuières et la plage, trois tags verts lumineux étaient ajoutés à la liste de mes prochaines cibles.
Pour continuer ce travail peu gratifiant, j’ai dû acheter quelques nouveaux outils, dont une nouvelle brosse métallique, et deux bouteilles de solvant, substitut de l’acétone, et de l’acétone, que j’ai trouvé supérieur au substitut. 30 euros de dépenses, 14 heures de travail pénible et une mauvaise ampoule cette fois-ci. Je ne sais pas combien de temps encore je vais persister à contrecarrer ces violations intolérables de la nature.
Depuis de nombreuses années, le passage dans cet escalier était obstrué des deux côtés par la végétation et par de profonds dépôts de terre et d’aiguilles de pin, ce qui rendait la rampe inutilisable.
J’ai taillé les pins d’Alep et la luzerne arborescente comme nécessaire, en retaillant aussi correctement toutes les branches taillées précédemment, universellement mal coupées laissant des moignons, et le bois mort. J’ai coupé toutes les branches enlevées en petits morceaux et je les ai déposées à l’abri des regards dans un tas de compost derrière la ligne de rochers de la calanque en bas. J’ai enlevé la terre et les aiguilles de pin déposées sur les escaliers et je les ai utilisées pour remplir une zone érodée adjacente au sentier. 8 heures de travail de jardinage en tout.
La réduction du risque d’incendie était également une priorité dans mon travail, comme dans les escaliers qui descendent aux Anthénors où j’avais enlevé les dépôts profonds d’aiguilles de pin le long des escaliers, ainsi que la plupart des branches mortes et des branches basses de la pinède.
Le 20 mars, quand je suis venu tôt le matin pour enlever les tags aux Anthénors, il y avait une odeur de brulé près de la plage. Les lentisques et les pins juste au-dessus de l’escalier étaient légèrement roussis. Heureusement, le danger d’incendie n’est pas encore prononcé. Un panneau d’interdiction de faire des feux sur la plage et de fumer devrait être présent.
En travaillant sur les escaliers au-dessus du port de Figuières, deux naturistes locaux qui fréquentent régulièrement la plage sont passés à côté de moi sans prononcer un mot d’appréciation, contrairement aux touristes, par exemple un groupe de Draguignan, qui se sont arrêtés pour converser et me remercier. Pendant que j’enlevais les inscriptions sur la plage, un seul naturiste local a manifesté le moindre intérêt pour ma contribution à l’amélioration de l’espace public, alors que certains randonneurs qui ne faisaient que passer ont exprimé leur gratitude. J’ai eu une expérience similaire quand j’ai rénové le sentier des Anthénors à Figuières, les gens d’ailleurs étant plus reconnaissants.
Addendum (le 29 septembre 2024)
Après avoir effacé tous les graffitis, j’ai délibérément laissé les quatre tags de Shak VG sur les murs intérieurs et la porte des toilettes publiques de La Redonne, afin de voir si les autorités locales allaient enfin lever le petit doigt. Comme je m’y attendais, la réponse a été comme d’habitude l’inaction. Des mois plus tard, après en avoir eu assez de voir les tags à chaque fois que j’utilisais les toilettes, j’ai fini par tous les enlever, ce qui a été assez rapide étant donné que les surfaces métalliques ne sont pas poreuses.
En mai dernier, sept mois après que j’ai fini de restaurer le vallon des Anthénors comme une zone sans tags, il y a eu une soirée de tags qui a radicalement transformé l’expérience de la visite du vallon. Des tags voyants, rouges, noirs et blancs, peints en couches épaisses, étaient partout sur les surfaces en béton. Les habitants ont fait appel à leur maire mais, comme d’habitude, il n’y a pas eu de réponse.
Au même moment, le naturiste qui s’obstine à dénaturer la nature en inscrivant NATURISTE et QNU sur les falaises rocheuses a réinscrit plusieurs de ses inscriptions que j’avais éliminées. J’ai décidé de retourner en mode combat, pour ainsi dire.
J’ai d’abord repris ma guerre à distance, qui dure depuis trois ans, contre le “dénaturiste”. Il semble y avoir un certain changement chez lui, une certaine prise de conscience que d’autres, surtout moi, préfèrent un environnement naturel exempt de ses inscriptions. Seulement trois d’entre elles ont été repeintes cette année.
La présence de tant de surface peinte en épaisseur m’avait intimidé et m’avait découragé. Donc, quand j’ai décidé d’entreprendre l’enlèvement de tous les tags, j’ai voulu en finir le plus vite possible, tout en le faisant très bien, ce qui a nécessité un processus laborieux et lent. Au mois de septembre, j’ai souvent travaillé deux fois par semaine, de manière obsessionnelle, en passant de longues journées, ce qui m’a causé des crampes douloureuses aux mains.
Mes souffrances ont été compensées par l’appréciation généralisée de ceux qui passaient par là. En même temps, j’ai senti que mes efforts étaient perçus de manière pessimiste, une perspective que j’avoue partager, compte tenu de la réalité culturelle actuelle qui permet de taguer en toute impunité. Je déteste tellement les graffitis que je l’ai fait quand même; je n’aime pas me résigner à accepter l’inacceptable.
Deux hommes plus âgés, plutôt conventionnels, m’ont surpris. L’un, originaire de Carry-le Rouet, m’a même dit qu’il n’était pas du tout dérangé par les tags dans un tel endroit. Je lui ai rétorqué qu’ils n’avaient pas leur place dans un environnement naturel. Il a alors répondu que les escaliers et la route en béton n’étaient pas naturels. J’ai répliqué que ces constructions résistantes à l’érosion remplissaient leur fonction. Il est reparti sans être convaincu.
Le second a pris une photo de moi en train de travailler pour la montrer à son fils, aujourd’hui adulte et issu de la classe moyenne, qui avait l’habitude de « s’éclater » en taguant, afin de lui montrer les conséquences de sa pseudo-révolte.
C’était mon troisième épisode de nettoyage de graffitis.
Le premier, en octobre 2023, a nécessité 37 heures de travail et 41 euros de matériel.
Le deuxième, en mars 2024, a nécessité 14 heures de travail et 30 euros de matériel.
Ce troisième, en septembre 2024, a nécessité 39,5 heures de travail et 71 euros de matériaux.
Le grand total est donc de 90,5 heures de travail et de 138 euros de dépenses. J’ai une réserve d’acétone pour l’avenir.
Je l’ai fait volontairement, mais à moins qu’il n’y ait des efforts concertés à l’avenir, ainsi qu’un remboursement financier de mes dépenses de la part des résidents locaux ou du gouvernement local, je ne peux plus continuer.
Les tags suivants, principalement sur des propriétés privées, doivent être enlevés pour décourager les autres tagueurs de percevoir qu’il y a un niveau de tolérance et de résignation, qu’il y a un feu vert pour continuer.
Au cours de mes six semaines de vacances l’automne dernier dans plusieurs États de l’ouest américain, j’ai rencontré très peu de tags dans les centres urbains et aucun sur des résidences.
Dans la culture américaine, il y a un niveau de tolérance beaucoup plus faible pour les dégradations de l’espace public, qui est davantage valorisé et apprécié, et une tolérance zéro pour les graffitis sur sa propre résidence. Les ripostes potentielles des habitants, la réactivité des autorités municipales et la répression policière permettent de prévenir une peste similaire de graffitis.
Récemment, lors d’une randonnée dans le massif du Garlaban, notre point de départ était Allauch, un village situé à la périphérie de Marseille. Je n’ai vu aucun tag, mais j’ai vu la police municipale dans les rues. Ils ont apparemment une tolérance zéro pour les graffitis.
Addendum (le 26 octobre 2024)
Comme les tagueurs laissent leur “carte de visite”, la preuve de leur délit, il ne devrait pas être difficile de les poursuivre. Autour de Marseille, on voit fréquemment STEACK, LIPO, etc., mais à ma connaissance, les auteurs ne sont jamais recherchés ou poursuivis.
M. SHAK VG est un multirécidiviste qui évidemment ne craint plus d’être attrapé et lourdement puni. Il a un penchant pour les randonnées dans la nature, ou est-ce plutôt qu’il fait des randonnées pour trouver des endroits vierges à taguer ? Récemment en randonnée, ma femme a rencontré ses tags dans deux endroits naturels locaux.
Il y a deux jours, quelqu’un qui avait découvert cet article a fait un commentaire :
“Bonsoir,
Nous subissons aussi la présence de ce SHAK VG dans le Queyras. Ce connard aime la nature mais nous préférons la nature sans lui! Selon moi, il aime surtout dénaturer la nature.”
Ensuite, il m’a écrit:
“Bonjour Larry,
[Jai fait] une belle randonnée dans le Queyras, le lac Saint Anne en partance depuis Ceillac en août 2023. Vous verrez que tout y passe, les panneaux de signalisation, rochers, arbres, arbres morts, divers… bref un carnage! Là nous sommes très loin de la ville où cette personne sévit à longueur de temps (Marseille). Je ne sais pas si vos actions aboutiront mais sachez que j’alimenterai vos propos si nécessaire.”…
Bien cordialement,
Romuald”
N’est-il pas temps que les tagueurs les plus flagrants comme SHAK VG soient montrés en exemple afin de dissuader les autres. Le Parc national des Calanques devrait entreprendre une procédure pénale contre lui.
Dans les parcs nationaux américains, on ne s’amuse pas avec de tels vandales. Les pollueurs par graffitis doivent se méfier.
A Marseille il y a une absence généralisée d’application des lois affectant la qualité de vie, comme par exemple: le littering (mégots de cigarettes, excréments de chiens; le stationnement des motos sur les trottoirs; le stationnement des voitures au coin des rues et l’excès de vitesse; la loi Evin de 1991 (l’interdiction de fumer dans les stations de métro, dans la gare St Charles, et dans les enclos extérieurs des cafés et restaurants). Par conséquent, de telles lois sont effectivement inexistantes.
Dans ma Californie natale, de telles violations qui portent atteinte aux droits, à la santé et à la sécurité d’autrui sont sanctionnées. Les plus graves sont sévèrement punis, servent d’exemple et les personnes de leur entourage réfléchissent à deux fois avant de se comporter de la même manière.
A titre d’illustration, l’un de mes frères qui a une entreprise d’entretien de piscines à Los Angeles, avait accumulé quand il était plus jeune tellement d’amendes impayées pour infraction au stationnement, avec des pénalités supplémentaires conséquentes, totalisant des milliers de dollars, qu’il a été contraint par la cour de justice d’accepter un régime de paiement sur plusieurs années afin d’éviter d’aller en prison. Sans surprise, il respecte désormais les lois sur le stationnement. Une application efficace de la loi instille la peur et le public américain respecte généralement, par exemple, les lois relatives au stationnement et à la conduite.
Je ne veux pas donner l’impression que je suis un partisan inconditionnel de la police, de la guerre contre les drogues douces comme le cannabis qui devrait être légal comme en Californie, ou que je ne critique pas les excès, les abus et la violence de la police.
Le 7 avril 2003, j’ai été l’une des 40 victimes d’une émeute policière au port d’Oakland, où 800 opposants à la guerre en Irak se sont engagés dans une action de désobéissance civile non violente pour fermer le port afin de retarder l’envoi d’armes. Les flics sadiques d’Oakland avaient leurs nouveaux jouets, des armes dites sublétales, avec lesquelles ils voulaient jouer à nos dépens. Une grenade à concussion m’a explosé en plein visage et j’ai souffert d’une perte partielle d’audition à l’oreille droite. Suite au procès qui a suivi, j’ai été indemnisé 8500 dollars.
Quand je vivais dans le ghetto noir d’Oakland je voyais la police patrouiller seule ou avec un partenaire, jamais à trois, à chaque heure de la journée. Dans mon quartier à Marseille, elle est inexistante.
En France il y a en fait pas mal de police ici par rapport à d’autre pays, 422 pour 100.000 habitants, tandis qu’aux Etats-Unis, c’est seulement 239 pour 100.000.
Le 8 mars 2024, journée internationale de la femme, lorsque j’ai défilé à Marseille sous la pluie pour soutenir le petit contingent de féministes, à notre arrivée à la préfecture, il y avait presqu’autant de CRS que nous, un gaspillage de ressources de police totalement absurde. Par contraste, aux États-Unis, la police (municipale, shérifs de comté, et patrouille routière de l’Etat) est multifonctionnelle et s’occupe du contrôle des foules et des émeutes. C’est un système beaucoup plus efficace.
Merci Larry de ce travail salutaire. C’est choquant. J’ai vu le reportage sur le taggeur en question. Et c’est vrai que la calanque de Niolon a ete defiguree par des graffitis. On a du mal a comprendre l’indifference des locaux pour cette pratique, en plein nature.
Bonsoir,
Nous subissons aussi la présence de ce Shak Vg dans le Queyras.. ce connard aime la nature mais nous préférons la nature sans lui!